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Jésus le Christ, parole et pain de vie, notre réconciliateur, notre justice et notre paix

Jésus le Christ, parole et pain de vie, notre réconciliateur, notre justice et notre paix

«Venez à moi, vous tous qui êtes fatigués et opprimés et moi je vous restaurerai» (Mt 11, 28). L’Église-Famille de Dieu qui est en Afrique trouve en ces paroles une invitation à la confiance, à jeter de nouveau les filets en profondeur, elle qui, depuis l’Assemblée Spéciale pour l’Afrique du Synode des Évêques, a fait une option préférentielle pour les pauvres. Elle manifestait ainsi que la situation de déshumanisation et d’oppression qui afflige les peuples africains la place devant une crise dans son sens original de «jugement» et devant un défi: la crise de conversion, de sainteté et d’intégrité; le défi de développer toutes les potentialités du message évangélique de l’adoption divine, afin de libérer les peuples africains du péché et des «structures de péché» de ce joug lourd qui pèse sur eux. Cette crise et ce défi nous portent à tourner nos regards vers Celui qui est notre Vie et notre Libération: Jésus le Christ!

Parole de vie en abondance

L’Épître aux Hébreux nous annonce que Dieu, «après avoir, à maintes reprises et sous maintes formes, parlé jadis aux Pères par les prophètes, en ces jours qui sont les derniers, nous a parlé par le Fils, qu’il a établi héritier de toutes choses, par qui aussi il a fait les siècles» (He 1, 1-2). Ce Fils par lequel Dieu nous parle est lui-même la Parole devenue chair: il est la preuve par excellence de l’efficacité de la Parole de Dieu telle qu’elle est attestée par le Prophète: «ainsi en est-il de la parole qui sort de ma bouche, elle ne revient pas vers moi sans effet, sans avoir accompli ce que j’ai voulu et réalisé l’objet de sa mission» (Is 55, 11). Devenue chair, cette parole est à l’origine de ce que nous sommes et faisons; elle est le fondement de toute vie. Par elle, Dieu nous engendre à une vie nouvelle, à condition que nous le recevions. Car, c’est à ceux qui l’ont reçu qu’«il a donné le pouvoir de devenir enfants de Dieu» (Jn 1, 12). C’est donc à partir d’elle que nous devons comprendre les traditions africaines, corriger et ajuster leurs visions de la vie, de l’homme et de la famille. Le Christ Jésus, Parole de vie, est la source et l’accomplissement de toutes nos vies.

Dans la tradition africaine, parole et vie sont intimement liées. La parole est efficace de manière à précipiter dans la mort ou à donner la vie. La Parole de Dieu devenue chair assume et élève le sens sacré qu’avait la parole dans les traditions africaines pour la rendre salvifique et la dépouiller de la mort, afin que personne n’aille à sa perte. Mais quand on voit combien le peuple africain est objet de manipulation par la parole monopolisée par la radio, la télévision et les discours politiques, on peut dire qu’elle est devenue on ne peut plus mortelle, alors que l’Évangile de Jésus-Christ a rehaussé infiniment son caractère sacré et vivifiant. Or, dans la ligne de la plupart des traditions africaines et des îles adjacentes, la parole devrait être une interprétation correcte du monde. Cet élément culturel et religieux devrait nous permettre de comprendre mieux ce que signifie l’être nouveau inauguré par Celui qui est Parole par excellence, et donc de qui découle désormais toute vie. Cela exige du chrétien une familiarité avec cette Parole, pour qu’elle devienne concrète dans sa vie quotidienne. D’où l’importance de la connaissance de cette Parole par le chrétien; non pas une connaissance purement intellectuelle, académique ou par «ouïe dire»; mais une connaissance qui jaillit d’une rencontre personnelle avec le Christ qui nous parle dans les Écritures Saintes. Il est urgent que nos communautés chrétiennes deviennent toujours plus ces lieux d’écoute profonde de la Parole de Dieu, d’une lecture orante des Écritures Saintes, comme nous le rappelle Sa Sainteté Benoît XVI: «la lecture de l’Écriture Sainte est prière, doit être prière, doit émerger de la prière et conduire à la prière». C’est dans cette lecture orante et communautaire en Église que le chrétien rencontre le Christ ressuscité qui lui parle et lui redonne espérance en la plénitude de vie qu’il donne au monde.

Mort et ressuscité, Jésus est confirmé comme source et accomplissement de toute vie: Il est le Principe de toute vie nouvelle; car en lui et par lui, Dieu donne au monde la Parole de vie et réconcilie désormais tous les êtres «en faisant la paix par le sang de sa croix» (Col 1, 20; cf. Col 1, 18sq.) et en étant la justification de tous. Cette justification et cette paix, il nous la donne au fil des temps dans le Pain rompu, qui rend concrète en nous sa Parole, faisant d’elle Chair avec notre chair, Corps avec notre corps pour qu’unis à lui nous reflétions sa lumière, sa présence dans le monde, nous donnions au monde la saveur divine.

Pain de vie

En effet, par le Pain rompu, le «Christ rend présent, au long du temps, son mystère de mort et de résurrection». Dans le Pain rompu, Il se donne «en personne comme ‘pain vivant descendu du ciel’ (Jn 6, 51) et, avec Lui, nous est donné le gage de la vie éternelle, grâce auquel, on goûte par avance au banquet éternel de la Jérusalem céleste». Dans ce festin pascal Dieu lui-même vient à notre rencontre, il vient nous chercher dans le quotidien de nos situations ordinaires et nous unir dans le mystère du don de son amour et anticiper ainsi l’union définitive avec lui. L’Eucharistie nous oriente vers l’avenir, vers l’ultime retour du Christ. Elle oriente notre attention vers l’attente du retour du Seigneur. Cette attente nous introduit dans une dynamique qui met en marche et qui donne à notre cheminement dans l’histoire le souffle de l’espérance.

L’Attendu n’est pas cependant absent de l’histoire, car l’Eucharistie le rend vraiment présent. Dans la réalité de son Corps et de son Sang, le Christ se rend tout entier substantiellement présent à nos vies, réalise sa promesse d’être avec nous tous les jours de nos vies jusqu’à la fin des temps (cf. Mt 28, 20) et nous renvoie vers nos réalités quotidiennes pour que nous puissions les remplir de sa présence qui jaillit de notre rencontre avec Lui. C’est cette relation intime et mutuelle avec Lui qui nous permet d’anticiper en quelque sorte le ciel sur la terre. Dans l’Eucharistie est bien mise en évidence que la vie est relation de communion avec Dieu, avec nos frères et sœurs, et avec toute la création entière. L’Eucharistie fait de nous Église, signe et instrument de son amour qui transforme le monde.

En effet, qu’y a-t-il de plus dramatique dans le contexte socio-politique et économique actuel du continent africain que la lutte souvent sanglante pour la vie et la survie? Et si la Première Assemblée Spéciale pour l’Afrique de 1994 a insisté sur l’Église-Famille de Dieu, quelle peut bien être son apport dans la construction de l’Afrique assoiffée de réconciliation et en quête de justice et de paix? Les guerres ethniques ou régionales, les massacres et les génocides qui ont libre cours sur le continent doivent nous interpeller d’une manière toute spéciale: s’il est vrai qu’en Jésus-Christ, nous appartenons à la même famille et partageons la même Parole de vie et le même Pain de vie, s’il est tout aussi vrai que nous partageons la même Vie, car le même Sang du Christ circule dans nos veines, faisant de nous les enfants de Dieu, membres de la Famille de Dieu; alors il ne devrait plus y avoir de haines, d’injustices et de guerres entre frères. D’où la nécessité d’approfondir et d’incarner dans la vie ce qu’est le mystère d’une Église-Famille.

Extrait du SYNODE  DES  ÉVÊQUES

IIème ASSEMBLÉE SPÉCIALE POUR L’AFRIQUE 2006

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